20e édition du Festival de danse de Cannes 2015

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Entrez dans la danse !

Le Festival de danse s’est clôturé le 29 novembre et les images se compilent dans mon esprit pour encore longtemps j’espère. Chacun a des attentes qui lui sont propres avant une représentation, en fonction de sa culture et de son expérience. Je me suis lancée dans ce festival, pas les yeux fermés (ce qui aurait été dommage !) mais sans apriori. Et je dois reconnaître que la programmation était judicieusement établie.

festival-danse-cannes-2015-afficheBrigitte Lefèvre, en prenant les rênes de cette 20e édition, espérait permettre au public « de voyager poétiquement et esthétiquement sur les territoires nuancés de la danse d’aujourd’hui ». C’est exactement ce que j’ai ressenti en passant d’un spectacle à l’autre, d’un univers à l’autre. Et tout ceci est arrivé crescendo.

Le festival s’ouvrait avec « Vortex » où la danse traditionnelle coréenne est réinventée par le finlandais Tero Saarinen. La scène du grand auditorium est étirée au maximum pour permettre aux musiciens d’être présents sur scène et d’inonder l’espace de ces sonorités si particulières. Une musique jouée en live, c’est quelques degrés d’émotion en plus ! danse-cannes-seebyc4Chorégraphie lente, très axée sur le travail des mains ; montée en puissance progressive. Je serai bien plus séduite durant la master class du lendemain.

Après des démonstrations de danses traditionnelles coréennes, un couple de danseurs va transmettre l’essence de cette danse à une poignée d’élèves.

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Durant deux heures le danseur détaille les mouvements dans sa langue (le coréen est incompréhensible mais que c’est beau !), l’interprète tente de traduire et les participants de les suivre. Ce moment est privilégié, hors du temps et on est quelques-uns à se prendre pour des grues (l’oiseau dont s’inspire cette danse) sur notre chaise, regrettant de ne pas être au milieu des élèves.

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Le lendemain, changement de registre. Théâtre de la licorne, scène bien plus petite. Michèle Noiret, toute de noir vêtue évolue sur le practice blanc et semble nous transmettre un discours intérieur dansé. Elle glisse, ondule, multiplie les micros gestes et les paroles chuchotées. Seule en scène, elle monopolise nos regards intensément.

A son énergie maitrisée succède le duo de « Dentro » de la Cie Diverres. Deux danseurs dans leur costume noir vont nous envoyer leur énergie de plein fouet. La chorégraphie est puissante, physique. On est complétement happé, en apnée, embarquée dans leur tourbillon de force et de passion. On ne trouve pas de mots pour raconter ce qu’ils nous livrent, on reçoit les émotions brutes. C’est fort et c’est ce que j’aime dans la danse.

danse-cannes-seebyc6Dimanche 22 novembre. Il fait beau sur Cannes et c’est bon signe. En début d’après-midi des centaines de danseurs et tout autant de spectateurs se sont données RDV sur la terrasse du Palais des festivals pour un Bal flash. Hervé Koubi, chorégraphe local s’est inspiré de chorégraphies de Béjart, Preljocaj, Merzouki… pour signer une partition apprise par les élèves d’écoles de danse cannoises. Dress code, bleu, comme le ciel et la mer en fond de scène ! 5 minutes de partage et de joie communicative encore plus appréciable dans cette actualité terrible des attentats parisiens. C’est si bon d’être tous ensemble que ça vaut le coup de rejouer les 5 minutes !

rizzoLa première partie du festival s’achève au Théâtre croisette avec la compagnie montpelliéraine dirigée par Christian Rizzo et son « Ad noctum ». Un couple de danseurs (magnifiques Julie Guibert et Kerem Gelebek) évolue sur un practice noir et blanc aux motifs cinétiques. Ils font corps et enchaînent les déplacements dans leur joli costume. Leurs derbys de cuir coloré crissent sur le sol quand ils pivotent. Les courbes des motifs du sol sans fin sont coupées par une ligne lumineuse verticale dans une sorte de totem, tel un 3e partenaire qui génère des sons et des lumières devenant presque un être à part entière. Ils réapparaissent en clown blanc, ni homme ni femme, le visage barré de frange, assortis, de la fumée sortant de leur costume. danse-cannes-seebycrizzoLe temps s’est arrêté. Il y a eux et le totem électrique, c’est tout ! Christian Rizzo est un artiste total, chorégraphe certes mais plasticien d’abord. Un créateur qui nous entraîne dans son monde sans besoin d’explications. On se laisse faire, c’est agréable. Pourquoi tout expliquer ? « Je connais l’amour mais je ne peux expliquer l’amour » dira-t-il lors de l’échange en fin de spectacle. En sortant on est plusieurs à reconnaître qu’on aimerait le revoir, là, tout de suite d’un autre angle. Juste pour prolonger le plaisir.

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@David Herrero

Le jeudi suivant reprise du Festival avec le Ballet du Capitole qui présente « La bête et la belle » revisité par Kader Belarbi. L’histoire se déroule limpide (enfin pas pour tous si on en croit les questions lors de l’échange qui suivra). Cette belle innocente, apparaissant naïve avec tous ses doudous, va grandir sous nos yeux, faisant de drôles de rencontres. Nouvelle émotion : le rire. Oui j’ai ri, en voyant des danseurs sur pointes roses presque cachés dans un groupe de danseuses. J’ai ri des allusions sensuello-érotiques, j’ai ri à l’apparition du Toroador avec son costume d’Elvis blanc sous vide laissant transpirer son trop plein de testostérone. A l’opposé, la bête semble fragile et on n’a qu’une envie, qu’elle croque la belle. Le spectacle est total, les décors sont splendides (on regrette de les voir partir si vite) et les costumes sont incroyables transformant les danseurs en oiseau au cou interminable. J’y vois une inspiration très Kubrick avec la musique (« Eyes wide shut ») et la structure sur laquelle glisse le Elvis très physique qui m’a rappelé « Orange mécanique ». Formidable !

danse-cannes-seebycgrenade2Le lendemain, les très jeunes danseurs du Groupe Grenade de Josette Baïz nous montrent l’étendue de leur talent dans la maîtrise des déplacements dans l’espace si caractéristiques de Bagouet. Avec une mosaïque d’extraits, les plus âgés d’entre eux nous ensorcellent entre duo contemporain et danse de groupe énergique et acrobatique. « Uprising », en final, est puisant autant par sa chorégraphie physique que par les sons des râles des danseurs. L’apogée est atteinte au final, à bout de souffle, pour le plus grand plaisir d’une salle conquise qui se lève pour les acclamer. On les quitte rechargé de toute l’énergie de leur jeunesse. Que c’est bon !

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Le soir au Palais, grande scène rime avec décor grandiose. Une sorte d’arbre très stylisé occupe tout l’espace et les danseurs de la Cie brésilienne Deborah Colker vont évoluer dessus et autour, dans cette version de « Tatyana », l’héroïne de Pouchkine. Les personnages sont multiples, la chorégraphie mêle classique et contemporain, les costumes brouillent l’époque et les lieux tant on se sent loin de la Russie. L’arbre central est le terrain de jeu des interprètes qui se livrent à des acrobaties surprenantes.

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Au premier acte si physique succède un acte plus mystérieux où les danseurs évoluent dans différents espaces, parfois floutés par des panneaux translucides. Les danseuses gantées toute de blanc (dé)vêtues sont ultra féminines et la Tatyana principale a des jambes incroyablement longues. J’en perds le fil de l’histoire mais peu importe le voyage auquel nous a convié la chorégraphe était bien agréable et si inédit pour moi.

Les jours se suivent et les univers avec. Samedi le théâtre de la Licorne est loin d’être plein et c’est dommage. Lors de la présentation de la saison de Cannes j’avais repéré ce spectacle, avec un teaser original qui remplissait parfaitement son rôle, ne rien montrer juste donner envie. « Dbddbb » c’est le titre de ce spectacle de la Cie belge Hiatus.

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Les cinq danseurs (2 filles et 3 garçons) vont occuper la scène pendant plus d’une heure se déplaçant d’une marche « simple » et évoluant au son de leur diction. Mots, onomatopées, notes… qu’ils répêtent, se répondent, se chantent, claquent des doigts, toujours en mouvement. Etonnant, entêtant, surprenant… certaines personnes quittent la salle. J’essaye de comprendre comment on peut apprendre cette chorégraphie si particulière, si simple en apparence mais aux déplacements si intenses. Je suis envoutée. De la créativité et de l’originalité jusque dans leurs costumes mixés, mi-jupe, mi-short, tee-shirts asymétriques, et leurs baskets colorées. Les voir jouer avec un métronome est un pur moment en apesanteur où le public retenait sa respiration. Merci Hiatus !

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@ Michel Cavalca

Le samedi soir le grand auditorium est plein à craquer pour accueillir le ballet de Lyon qui propose trois œuvres de Jiri Kylian, maître de la chorégraphie contemporaine. Les excellents danseurs nous livrent cette sublime partition qui met tout le monde d’accord. Tout sert à la danse, tout est décor ou partenaire comme le rideau dans lequel une danseuse se fond, les tapis de sol dans lesquels les interprètes se cachent ou se réfugient, des rideaux qui modifient la taille du cadre, comme pour zoomer sur un morceau de scène et concentrer les regards. Trios, duos et quatuors nous transportent dans leurs sentiments profonds. Je repense à Rizzo « ça ne s’explique pas ». Certaines chorégraphies insufflent de l’énergie, de la joie d’autres de la mélancolie, de la passion voire comme ici une immense tristesse. Et quand on ressent cette transmission chez plus de 2000 spectateurs, il se passe quelque chose d’indéfinissable, de beau. Du grand art.

Les nuits Barbares - Guillaume GABRIEL koubi
@ Guillaume Gabriel

Je ne pourrai vous parler de la dernière journée puisque les spectacles du jour étaient complets. Bonne nouvelle pour la danse, dommage pour moi. Les échos du spectacle de Koubi et de la Carmen du CND d’Espagne sont très enthousiastes. Je me console en me disant que j’aurai une séance de rattrapage en 2016 puisque « Les nuits barbares » d’Hervé Koubi sont programmées au Forum de Fréjus.

Rendez-vous en 2017 pour la 21e Edition du Festival de Danse de Cannes !

 

 

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4 réflexions sur « 20e édition du Festival de danse de Cannes 2015 »

  1. je suis déçue car jai lu votre article et je me dis que j’aurai bien aimé voir des spectacles, j’espère que vous ns direz quand le prochain aura lieu que je rate pas cette fois. 😉 j’aime bien votre site il est interessant et chic.

    1. Waou le prochain festival de danse aura lieu en 2017 puisque c’est une Biennale. J’espère que le blog sera toujours actif et vivant pour vous prévenir !

  2. j’aime bien la danse, je trouve qu’il n’y a pas beaucoup de spectacle hors festival, c’est dommage.

    1. Je ne peux pas te laisser dire ça Elsa. Beaucoup de spectacles de danse sont programmés, il faut juste aller chercher l’info et c’est ça le plus compliqué !

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