Mais quelle année les amis! Une année marquée par le RETOUR dans les salles obscures après de longs mois de fermeture dus à cette crise sanitaire planétaire sans fin. Alors après tant de frustration, ce qui restera de cette reprise c’est l’immense plaisir que nous avons ressenti à nous retrouver dans une salle, à fouler l’épaisse moquette, à regarder tous dans la direction de l’écran blanc. Et ce n’est pas ce petit bout de tissu chirurgical qui nous masque (encore) la moitié de visage qui va gâcher tout ça!
L’année 2021 a commencé en juin… par chance avec beaucoup de bons films. Cette demi-année a vu les femmes réalisatrices célébrées dans les grands festivals (Palme d’Or pour Julia Ducorneau (lire ici), Lion d’Or pour Audrey Diwan avec le très fort « L’événement »). Une année amputée de sa fréquentation qui a un peu plus creusé le fossé entre les salles et les plateformes de streaming.
Fidèle à moi-même j’ai dévoré des films, toujours sur grand écran (ou presque ;-)). En 6 mois j’ai vu 95 films. Je les ai listés et en écrivant leur titre, certains m’ont fait remonter de belles émotions à la surface et d’autres… rien ! J’ai souligné tous les titres que j’avais aimés. J’ai entouré ceux que j’avais envie de ne jamais oublier, de revoir avec plaisir ou qui avaient laissé une forte empreinte dans ma valise à émotions.
Voici mon top10 2021. Il n’a pas d’ordre de préférence, pas de hiérarchie, juste un ordre chronologique de sortie. Ce sont mes 10 chouchous 2021!
Sound of métal
de Darius Marder
Il a peut-être bénéficié de l’engouement du retour en salle mais j’ai été embarquée dans l’histoire de ce batteur qui perd l’audition en pleine tournée avec son amoureuse chanteuse. Son itinéraire pour accepter son handicap tout nouveau, le travail minutieux fait sur le son, l’intro à la batterie, l’implication de ses 2 acteurs principaux (Riz Ahmed, Olivia Cooke)… Bref, j’ai beaucoup aimé ce film !
Annette
de Leos Carax
Je l’ai découvert comme tous les heureux festivaliers le soir de l’ouverture du Festival de Cannes. Pas au palais en tenue de gala mais dans un cinéma de quartier en jean-baskets, qui comme beaucoup de cinémas, projette en simultanée sur grand écran, la cérémonie et le film d’ouverture.
1er film du Festival 2021 et 1ère claque. L’opéra rock de Leos Carax m’a retournée avec sa mise en scène flamboyante, son histoire contemporaine, son casting (Adam Driver for ever!) et sa B.O. signée des Sparks qui m’a accompagnée au-delà du Festival. L’avantage avec les films musicaux c’est que tu peux écouter, chanter la BO en pensant aux images et fredonner les paroles à la projection. Il suffit que je pense à la scène où Annette vient voir son Adam de père en prison et des frissons me parcourent le corps… si si !
J’ai revu le film ensuite et tout ce qui m’avait agacé (les longueurs des scènes de stand up en particuliers) ou déplu avait disparu. La force des grands films. Et quelle belle idée cette façon de nous faire entrer et sortir du film !
Drive my car
de Ryusuke Hamaguchi
Durant cette année, j’ai trouvé que beaucoup de films étaient longs (+ de 2h) et que souvent ce n’était pas justifié. Qu’au contraire, quelques coupes aurait fait du bien au film. Et puis j’ai vu les 3h de Drive my car et je n’ai eu envie de rien couper ! Ces 3 heures nous laissent le temps de faire connaissance avec ses personnages complexes et c’est ce qui rend la progression dans leur quête si intense. Si vous ne l’avez pas vu, ne lisez rien dessus et laissez vous embarquer… en Saab 900 !
Illusions perdues
de Xavier Giannoli
2h30 ! là non plus pas le temps de se lasser. Le récit intense porté par la mise en scène virevoltante de Xavier Giannoli et un casting 4 étoiles (Depardieu, Lacoste, Cécile de France, Stevenin, Dolan, Balibar autour de Benjamin Voisin parfait). C’est LE film français grand spectacle de l’année. Une adaptation de Balzac, sur une société où tout s’achète et se vend qui fait écho à notre époque actuelle. Des décors, des costumes et des lumières magnifiques. Un vrai grand film populaire. Un régal !
Julie en 12 chapitres
de Joachim Trier
Je ne voudrais jamais oublier ce matin cannois où je montais les marches pour aller voir ce » Verdens verste menneske » dont je ne savais rien (à part la présence de Anders Danielsen Lie qui m’avait touchée en plein coeur dans « Ce sentiment de l’été » de Mikael Hers) à la 1ère séance au palais. 2h10 plus tard je ressortais chargée de mille sentiments enthousiastes fous. Cet état entre jubilation et allégresse est resté en moi toute la journée. Quel pouvoir ! L’histoire de cette Julie qui a du mal à faire ses choix… c’est vous, c’est moi… c’est la vie. A sa sortie en salles je l’ai revu avec l’appréhension de ne pas retrouver cette émotion. Alors quand la magie opère à nouveau, je peux crier « What a film ! ». Il entre directement dans mon Panthéon personnel ! Bim!
La fracture
de Catherine Corsini
Découvert à Cannes également, la Fracture est pour moi celui qui dépeint le mieux notre société actuelle. Après des mois de crise Covid, de confinement, déconfinement où les français ont applaudi les soignants, le film installe son récit à l’hôpital public un soir de manif des gilets jaunes. Des tensions montent ici et là alors que les conflits manifestants/policiers s’intensifient dehors, les patients s’impatientent et le personnel tente d’assurer son service. On oublie complètement qu’on est dans une fiction, on oublie qu’il y a une réalisation, on est porté par l’énergie de toutes les petites histoires qui s’entrechoquent. C’est toute la force du film.
Tralala
de Arnaud et Jean-Marie Larrieu
ça faisait longtemps que j’attendais le nouveau film des frères Larrieu, aussi je ne voulais rater sous aucun prétexte la séance de 22h à Cannes en présence de l’équipe. Je me méfie de ces séances de gala. Les ovations sont quasi systématiques. ça peut fausser la perception du film. Je l’ai revu à sa sortie et le charme a opéré. « Ne soyez pas vous même… » c’est ce que va faire Tralala, le chanteur de rue, en allant à Lourdes où Lili voit en lui, Pat, son fils disparu. Tourné pendant le confinement, le masque est présent partout. On s’y cache derrière, on le tombe pour livrer ses sentiments. Cette comédie musicale nous emporte lentement dans sa douce folie portée par les chansons de Katerine, Daho, Cherhal, Dominique A et Bertrand Belin, véritable révélation !
J’aime les comédies musicales aussi 2021 aura été une année exceptionnelle avec « Annette », « Tralala » et le remake signé Spielberg de « West side story » qui ne fait pas partie de mon top. J’ai été biberonnée à la BO du film de Robert Wise que je connais par cœur (j’ai toujours le double 33 tours). J’ai passé le film à me demander pourquoi, puisqu’il en avait les moyens, le maître Steven n’avait plutôt réalisé une œuvre originale. Même si dans cette version l’émotion finit par l’emporter, j’ai trouvé le casting fade comparé à l’original, la réalisation moins au service de la chorégraphie et une photographie chargée de halos « publicitaires ». Bref, l’original avait moins de chichis. Fin de parenthèse !
Oranges sanguines
de Jean-Christophe Meurisse
Ames sensibles s’abstenir. Mais ce serait dommage de ne pas se laisser entrainer dans ce tourbillon ultra politiquement incorrect ! Des personnages dont les histoires se regroupent, s’entrecroisent. Un film qui s’autorise tout. A chaque moment, je me suis dit « ils ne vont pas aller jusque là » ? Eh bien si, ils y vont, pire encore et fracassent tout. La troupe de comédiens jubile à jouer cette partition extrême et tous sont excellents. Ce n’est pas du tout un film grand public et ça me rassure que ce genre de projet puisse encore voir le jour. Un film punk !
L’événement
de Audrey Diwan
A l’inverse d’Oranges sanguines, je suis sortie de la séance de ce film-ci en me disant qu’on devrait le montrer à tout le monde. Adaptation du livre de Annie Ernaux, le film suit une jeune étudiante qui va tout faire pour ne pas poursuivre sa grossesse non désirée à une époque où avorter est puni par la loi. On vit tout, toutes les étapes, toutes les tentatives au plus près d’elle. Tout est dit, tout est montré. C’est un film puissant sur un sujet si régulièrement remis en question. L’interprétation de sa jeune comédienne, Anamaria Vartolomei, est époustouflante de vérité.
Une vie démente
de Ann Sirot et Raphaël Balboni
Beaucoup de films cette année ont évoqué la vieillesse, la maladie, la fin de vie (The father, De son vivant, Tout s’est bien passé…). J’ai été attirée par Une vie démente par son affiche avec ce couple « en fleur ». Tous les deux ont le projet d’avoir un enfant au moment où la mère du garçon, galeriste d’art, part de plus en plus en vrille. Une apparente simplicité dans la mise en scène, des plans fixes face caméra avec un souci du détail dans le choix des décors simples et des costumes assortis. La démence traitée ici avec beaucoup de sensibilité et de bienveillance. Le trio d’acteurs est génial, mention spéciale à Jo Deseure qui excelle dans le rôle de la mère qui redevient enfant. Malgré son sujet, c’est un film très positif à haute teneur en émotion. J’ai a-do-ré.
Madres paralelas
de Pedro Almodovar
Une année avec un film dePédro à l’affiche est toujours une grande année. Le réalisateur espagnol n’en finit pas d’explorer les thèmes qui lui sont chers : la famille, la maternité, la filiation, les secrets de famille… Peneloppe CRuz est une nouvelle fois au centre de l’histoire et va passer par tous les sentiments. Les images sont belles, les cadrages et les couleurs très Almodovar, le générique et des musiques soignés. C’est toujours un plaisir de se laisser embarquer dans son cinéma.
La panthère des neiges
de Marie Amiguet et Vincent Munier
J’adore voir des documentaires au cinéma. Celui-ci est très écrit et pour cause : c’est Sylvain Tesson qui repart sur les traces de sa panthère des neiges au Tibet avec le photographe Vincent Munier qui va lui apprendre l’art de l’affût : guetter sans cesse, être toujours prêts à capturer des images d’animaux rares. Le temps suspendu, la contemplation, la connaissance de la nature, les chuchotements, les regards de Vincent, les mots de Sylvain et la voix de Nick Cave font de ce film une pépite intemporelle qui fait un bien fou à l’heure du « tout, tout de suite ». En slowlifeuse convaincue je n’ai pu qu’être séduite.
Voilà ! Ils sont 10. C’est toujours frustrant de ne pas citer tous les films qu’on a aimé aussi et qui auront marqué cette demi année : Titane, The father, Bac nord, Le sommet des dieux, les amours d’Anaïs, Serre moi fort, First cow, Aline, Compartiment 6, Bergman island, Lamb, les Olympiades, les choses humaines…
Vive le cinéma !